Interview Sonika Studio par Label AÉ Paris
Faire sens dans la simplicité et l’utilité : c’est le secret des créations de maroquinerie Sonika Studio. À travers chacune de ses créations, Sonia la fondatrice de la marque, rend hommage aux femmes qui l’entourent ainsi qu’aux savoir-faire du Cambodge (son pays de cœur) et de la Hongrie (son pays d’origine). Par ce voyage à travers les âges, les styles et les frontières, chacune de ses pièces possède une essence intemporelle au design contemporain. Découvrez l’histoire de cette mompreneur, designer et créatrice à travers ses confidences au Label AÉ.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Sonia, je suis hongroise et je vis à Paris depuis maintenant 12 ans. Je suis passionnée par le beau et l’utile. Je suis arrivée à Paris en Erasmus. Je pense que cette année d’échange m’a fait beaucoup grandir parce que la Hongrie n’est pas si loin mais il y a beaucoup de différences entre les deux pays. J’ai donc beaucoup progressé durant cette année d’étude et ça m’a énormément plu. C’est à partir de là que je me suis dit : “Si je peux rester, je reste !” (rire). Suite à cela j’ai obtenu une bourse pour faire un Master spécialisé au sein de L’École Nationale Supérieure de Création Industrielle (ENSCI – Les Ateliers) à Paris. Il s’agit d’une école de design assez réputée donc j’étais très contente de pouvoir accéder à cette formation. Par la suite, les événements se sont enchaînés et j’ai voulu mettre à profit ma formation de designer dans ma marque qui s’appelle Sonika Studio.
J’ai fondé Sonika Studio en 2018, juste avant la pandémie. Après il y a eu une petite pause parce que j’ai eu un bébé entre-temps et que nous avons vécu les différents confinements. J’ai repris mon projet en main l’été dernier avec une campagne de trust funding qui a très bien fonctionné. Grâce à cette collecte, j’ai pu démarrer la production et réellement lancer ma marque. C’est donc tout frais et il y a déjà plein de choses qui se passent pour nous, on est très motivé pour continuer sur cette jolie lancée ! Je suis très contente d’avoir pu faire ce cheminement.
Toutes nos félicitations pour votre enfant !
Oh entre temps, il y en a eu un deuxième aussi (rire). Je pense qu’entre la gestion de mes enfants et les appels professionnels, je correspond tout à fait au registre de mompreneur ! C’est aussi une grande source d’inspiration pour moi.
En parlant d’inspiration, quelles sont vos principales sources d’inspiration ?
Tout ce qui m’entoure est une source d’inspiration ! La collection en est un peu la preuve. En effet, cette collection est inspirée de Krama qui est un tissu combodgien tissé à la main avec une technique traditionnelle. J’ai découvert ce tissu grâce à ma belle-famille puisque mon mari est d’origine cambodgienne. J’ai ainsi été en contact direct avec cette culture grâce à sa famille et ses proches. Ça m’a beaucoup inspiré puisque l’artisanat et tout ce qui est fait-main me fascinent. C’est quelque chose que je souhaite mettre en valeur.
Sinon plus esthétiquement, j’aime beaucoup tout ce qui est Bauhaus, le design Memphis, les choses assez simples, épurées, minimalistes qui sont inspirées des formes primitives comme le rond, le triangle ou encore le carré. Je m’inspire beaucoup de ces lignes simples. J’aime mélanger cette vision du design à travers laquelle je me dis toujours “less is more” avec les savoir-faire qui ont une dimension traditionnelle, historique et ancestrale.
Vos origines hongroises ont-elles aussi joué sur votre créativité ?
Oui dans le sens où je savais que la maroquinerie hongroise est très qualitative et maîtrisée bien qu’elle soit moins connue et reconnue que la maroquinerie française ou la maroquinerie italienne. C’était donc une évidence pour moi de faire fabriquer mes sacs dans des petits ateliers en Hongrie, pour mettre en valeur mon pays et son savoir-faire.
Vous défendez une production slow alliant la mode à un mode de consommation plus responsable. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre approche ?
Mon approche d’une consommation raisonnée vient vraiment s’intégrer au tout début de la conception. Je voulais absolument confectionner des pièces qui sont intemporelles et capables de traverser des saisons c’est-à-dire que je peux les mettre aujourd’hui mais aussi dans 20 ans sans qu’elles ne perdent en fraîcheur et en style.
Ensuite au niveau du choix des matériaux je suis guidée par cette idée de choisir des matériaux produits dans les meilleures conditions afin qu’ils ne soient pas nuisibles à notre Terre. La qualité résulte également de ce choix puisque je souhaite créer quelque chose qui puisse perdurer.
Enfin au niveau de la fabrication je favorise les petites séries en fonction des demandes plutôt que la production en grandes séries. Cette approche est aussi une occasion intéressante pour une petite marque d’être à l’écoute du client et de récolter des retours. Ça permet d’être plutôt agile à ce niveau là et c’est cette vision que je favorise. Je ne cherche pas à vendre en grande quantité pour faire beaucoup de chiffre. Je préfère avoir des clients heureux, avec des sacs qui peuvent leur servir dans leur vie de tous les jours !
Avez-vous une pièce favorite ? Si oui, laquelle et pourquoi ?
Je les aime toutes pour des raisons différentes ! D’autant plus que je les teste toutes pour avoir cette expérience d’usage. Mais si je devais choisir une pièce préférée, ce serait le tout petit Sokaya parce que c’est le deuxième prénom de ma fille. C’est la plus petite pièce de la collection et je lui ai donc naturellement donné le nom de ma petite fille. D’ailleurs tous les sacs sont nommés d’après les gens qui ont inspiré le sac dans l’usage ou dans le style. Les noms sont des prénoms cambodgiens. C’est dans ma belle famille ou dans mes amies que j’ai vu une typologie de femme et que je me suis dit : “Ah ce type serait parfait pour elle !”. C’est comme ça que la conception a commencé.
Comment se déroule le processus de création du dessin au produit fini ?
Ça commence toujours dans la tête. La collection était vraiment particulière avec le Krama qui m’a beaucoup inspiré. Après je pense à une de mes proches qui incarne une certaine typologie de femme. Ensuite je dessine en fonction de tout ce que j’aime, à savoir les formes épurées et simplistes. Je dessine donc forcément des sacs dans ce sens. Je porte également une attention particulière à l’usage dès le début puisque le but du sac est de nous accompagner au quotidien et de nous être utile. Je fais parfois une maquette 3D de ces sacs pour me rendre compte des proportions et des tailles afin de valider le volume et l’usage.
Ensuite avec ce dossier où j’ai défini les tailles, le design et les matériaux, je vais voir mon atelier en Hongrie et on discute ensemble des différentes possibilités techniques pour réaliser les sacs. Par la suite, je reçois les premiers prototypes et j’effectue alors les potentiels ajustements. Je confronte d’ailleurs souvent ce prototype à des clients potentiels pour récolter leurs feedbacks. Je n’écoute évidemment pas tous les feedbacks parce que chaque personne a une vision différente mais si il y a un retour qui revient beaucoup je peux réadapter le sac en ajoutant un bouton ou une poche pour plus de fonctionnalité par exemple. Avec tous ces ajustements je crée le sac est prêt à être produit en plus grande quantité.
Selon vous qu’est-ce qu’une mode intemporelle ?
C’est un style qui peut être valide il y a 20 ans, aujourd’hui et dans 20 ans. C’est cet aspect d’intemporalité que j’ai souhaité intégrer au niveau de la conception.
C’est tout simplement quelque chose que l’on est capable de porter aujourd’hui, dans 20 ans ou il y a 20 ans. C’est une pièce qui restera toujours quelque chose qui correspondra à un style vestimentaire et qui fonctionnera bien sans que l’on ait à mettre un label dessus de type “Oh ca c’est trop année 80”, vous voyez ? Ce sont des pièces qui font naturellement sens au fil des décennies.
La mode intemporelle c’est aussi le croisement des cultures et des époques. L’usage du tissu traditionnel Krama mêlé au design contemporain représente pour moi cette intemporalité.
Pourquoi avoir choisi le Label AÉ pour représenter votre marque ?
C’était une rencontre un peu par hasard mais j’ai tout de suite apprécié la façon dont les marques sont sélectionnées chez Label AÉ. Je trouve qu’il y a une volonté de sélectionner des marques qui ont un réel sens plutôt qu’une grande quantité de marques. Par ailleurs, j’ai beaucoup aimé cette mise en avant du voyage. La notion du voyage colle très bien à mon histoire personnelle avec le Cambodge. Pour ces différentes raisons, rejoindre le Label AÉ et ses créateurs fait sens pour ma marque.